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Les grandes vacances

cecileluherneart

Au commencement, une vaste toile immaculée.

Au commencement sur cette toile il n’y avait rien, et rien non plus comme idée ; juste l’envie de la peindre, cette grande toile blanche. Juste peindre. Le geste, la pulsion, sans guide. J’ai commencé par poser des couleurs, par y construire peu à peu une autre dimension en habillant la surface. Briser l’uniforme du vide.

Au commencement il n’y avait rien, mais il y avait moi, cet appartement presque face à la mer, la lumière du littoral breton au soleil malicieux ; il y avait mon entourage aimant et la joie de créer, l’enthousiasme d’un métier fascinant qui devenait concret. Je peignais sans calcul mais j’avais pourtant déjà fait des choix inconscients : ceux d’évoquer la lumière plutôt que l’obscur, la gaieté plutôt que les tourments, l’harmonie plutôt que le déséquilibre et le malaise. Je peignais là mon second tableau le plus grand, devant réinventer ma gestuelle et choisir d’autres outils.


Le temps de peindre, peindre le temps

Quand j’eus rempli la page de couleurs brillantes et douces dominées par le bleu, puis de vert amande, d’éclats orangés et d’un gris doux presque parme, j’ai trouvé que ce monde abstrait était trop plat, trop plein, trop unidimensionnel. Il manquait une fenêtre pour s’échapper, des perspectives d’évasion et de rêverie, de la clarté aussi. J’ai masqué les endroits les plus beaux pour les conserver intacts et j’ai peint de nouveau au-dessus du reste avec une couleur crème, puis bleutée, orangée, reprenant les mêmes nuances avec en plus un peu de blanc pour creuser encore cette planéité peinte.

De ces phases successives dans le processus de création est ainsi né un tableau fait de plusieurs espaces visuels et le temps s’est immiscé dans l’image statique. L’évocation des possibles qu’elle exhibe s’est encore élargi. Un peu de noir en accents souples, gracieux comme des ailes, on achevé de donner au regard quelques perchoirs contrastés dans les nuances mouvantes.


A la rencontre de mon tableau

Une fois que plus rien n’était à dire, que le tableau lui-même se tenait comme un tout ; une fois que rien n’inquiétait mon regard par son décalage ou son incongruité, j’ai signé, j’ai posé mes pinceaux. Je découvrais maintenant ce tableau su par cœur pour m’y être penchée de longues heures. J’apprenais son histoire, ce qu’il avait à dire. Il me chantait le ciel, les rires en cascades, des horizons lointains ; le soleil du désert, mais celui aussi réfléchi par les gouttes sur la peau nue, sur une plage d’été. Il parlait de désir d’évasion, de jour au présent perpétuel, quand les heures s’étirent sans qu’on les voit passer. Je voyais dans ce tableau des cornets de glace, l’odeur de la crème solaire, le sable et la mer, et par dessus-tout l’insouciance teintée de mélancolie que les voyages impriment à notre pensée en suspens, en paix, en vacances. C’était cela exactement : j’avais peint des vacances, l’idée de vacances, avec le florilège délicieux de toutes les représentations mentales et symboliques que l’on peut leur prêter. Et comme c’était un grand format, par clin d’œil autant que pour souligner leur importance entre toutes, je l’ai appelé : "Les grandes vacances".


"Les grandes vacances", 97 x 130 cm, acrylique sur toile.
"Les grandes vacances", 97 x 130 cm, acrylique sur toile.

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